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Le Giro vu de mon canapé (2018)
5 mai 2018

Première étape : Jérusalem (9.7km c-l-m). Au recommencement.

Au recommencement

 

Alors comme ça je recommence ? Je replonge dans la chronique quotidienne du Giro, après la belle aventure immobile de l’année passée ? Je dois admettre que la décision n’a pas été facile à prendre, ce hobby prend du temps, et je ne suis pas certain d’en avoir autant cette année. 
Si je rembobine le fil de cette année écoulée, ces moments face à la télé à scruter pendant des heures le peloton serpentant sur les routes sinueuses d’Italie sont un peu le point de départ de mon rebond, le sol que j’ai touché de la pointe des pieds pour ressortir la tête de l’eau. Il a bien fallut que j’accepte mon cancer, et contraint par la maladie a rester au fond de mon canapé, la chronique du Giro 2017 m’a vidé la tête, ou plutôt le contraire, m’a remplit la tête d’autres horizons d’autres mots – ceux qui comprennent la référence auront droit à un dîner à la maison. Oui, cet exercice quotidien, même si ce n’était que de plaisir, m’a permit de repartir, de saisir de la vie ce qu’elle avait encore à me donner. Même si pour cueillir ce qu’elle offre, il faut souvent se baisser. L’expression « il n’y a qu’à se baisser » peut alors paraître complétement idiote quand on est atteint d’une maladie qui ronge les os.
Toujours est-il que je me suis baissé, et malgré mes douleurs extrêmes, j’ai cueilli. J’ai même ramassé pas mal, et le traitement (débuté en avril dernier) conjugué au soutien que j’ai glané – il ne sera jamais de trop – m’ont offert quelques répits dans cette longue ascension. J’ai donc accumulé des jours de vie. Quand je repense à cette période printanière avec les images de la Corsa Rosa en arrière plan, je n’arrive pas à ne pas y voir de bons souvenirs. Des bons souvenirs alors que j’étais alité, incapable de faire quoi que ce soit de mon corps, pendant que des jeunes hommes défiaient les plus belles pentes de la péninsule italienne ? Oui. Sans aucun conteste possible, oui. Aussi, parce que certains d’entre vous m’ont suivi et même encouragé. Je ne saurais trop vous remercier. Ecrire et avoir été lu, même juste un peu, a fortement contribué à ne pas détruire mon enthousiasme. Cet amour de la vie qui me tient au corps et à l’esprit.

 




Puis, le Giro 2018 a été dévoilé. Nous avons appris qu’il allait une nouvelle fois s’inscrire dans une histoire qui le dépasse forcément. Les organisateurs ont concocté une nouveauté, une surprise, aussi baroque que les églises qui parsèment la botte. Un départ hors Europe. Pour la première fois dans l’histoire du cyclisme, une grande course s’élancera d’ailleurs, d’un autre continent. Rien d’étonnant en soi, l’internationalisation de ce vieux sport européen est en marche. Mais le choix de Jérusalem, et donc d’Israël comme point de départ était des plus insolites, et de mon point de vue, des plus... couillus, passez-moi l’expression. Inutile de refaire l’historique géopolitique de la région et de rappeler les heures sombres que l’on vit à cause d’un fanatisme religieux et/ou politique qui touche la région du Moyen-Orient. Mais partir de Jérusalem, quelle belle idée. Jérusalem. Le centre du monde, ou du moins, le centre de la méditerranée à plusieurs égards. Contrairement à son rituel, l’arrivée du Giro ne sera pas jugée à Milan mais à Rome. Jérusalem – Rome, le parcours du Giro 2018 a fière allure sur le terrain symbolique.

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J’ai toujours rêvé de Jérusalem. Jérusalem, moi, l’athée presque convaincu – presque, car un athée sans le doute, cela me paraît antinomique ? Jérusalem, cette cité trois fois Sainte ? Oui, trois fois oui, comme diraient certains jurys de télé crochet.  
Je n’étais pas encore malade, ou ne le savais pas encore, et me trottais un rêve en tête. Emmener mon grand-père, dont la course était passée dans ses contrées siciliennes l’an passé (et y repassera encore cette année), l’emmener à Jérusalem, en Palestine, en Terre Sainte, sur les traces de cette Histoire dont il a décidé d’en faire une croyance religieuse, une foi. L’accompagner dans ce voyage intime pour l’une de ses dernières balades. Mon cancer s’est découvert. Nonno, avoisinant ses 95 ans s’est affaiblit, hospitalisé durant le Giro au mois de mai dernier, il est parti peu de temps après. Je n’ai pas pu réaliser ce vœu, je n’ai pas pu le voir pendant ma maladie, éternel regret parce que je suis certain qu’il m’aurait transmis de sa force, m’aurait aider à accepter et à trouver le courage de rester optimiste. Je n’ai pas réussi à aller à son enterrement. Alors, vous imaginez bien que ce choix de Jérusalem avait une connotation toute particulière pour moi.

 

Je n’étais pas parti pour repartir. Je vais mieux. Je me lève désormais de mon canapé, et j’ai même, oh ce n’est vraiment pas grand chose, pu remonter sur mon vélo pour faire quelques hectomètres. Un formidable exploit qui me remplit de fierté. Alors, je pensais avoir autre chose à faire que de raconter le Giro, malgré tout l’amour que je lui porte. Mais hier, quand j’ai vu ces coureurs casqués, montés sur leurs machines un brin futuristes, longer les remparts de cette vieille ville multi millénaire, l’envie de reprendre le clavier pour noter mes impressions a été plus forte que la raison et l’emploi du temps.

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Mine de rien, l’événement est majeur, ce n’est pas toutes les années que la Corsa Rosa a droit au chapitre sur les grandes ondes ou dans les journaux télévisés. La charge symbolique d’un tel départ est concrète. C’est une belle victoire pour cette prise de risque. Sur l’écran de l’Equipe TV, Les téléspectateurs ont pu admirer quelques lieux parmi les plus mythiques du monde : Mont des Oliviers, Saint-Sépulcre, Mont du Temple, Mur des Lamentations, Porte de Jaffa et ce sublissime Dôme doré du Rocher qui scintille dans le ciel laiteux de Jérusalem. Idéal pour me donner l’envie de me faire la promesse de fouler de mes pieds ce sol, le plus tôt possible, tant que c’est possible.  

 

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Puisque tout semble recommencer d’où l’on s’est arrêté, la suite est logique, déjà écrite, biblique diraient certains vu l’endroit où l’on se trouve, c’est sans surprise que Tom Dumoulin a réendossé ce beau maillot rose qu’il avait reçu lors du dernier chrono à Milan. Sur ces 10 km urbains, techniques et même assez difficile – les purs grimpeurs limitant plutôt bien la casse à part Fabio Aru – le hollandais semblait en état de grâce, son élégance sur cet exercice est purement christique. Son maillot arc-en-ciel moulant son corps sculpté, Tom Dumoulin survole, tel un ange, tous ses adversaires. Il rejoint chrono après chrono, le panthéon des plus grands stylistes de cet exercice.

 

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Puisqu’on (je) ne peut s’empêcher de faire des allégories mystiques – et faciles, l’on pourrait être tenté de penser que sur ces terres où chacun pense détenir et lutter pour LA VERITE, la lourde chute de Christofer Froome lors de la reconnaissance du parcours ressemble à une sentence, une punition divine. Attention Christofer, le Giro est une course plus irrationnelle que le Tour. Tellement irrationnelle que je me suis replongé dedans avec délice.

 

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