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Le Giro vu de mon canapé (2018)
8 mai 2018

Journée de repos

TRANSFERT

Il est bien loin le temps des Grands Tours au tracé linéaire, quand on repartait le lendemain matin d’où on était arrivé la veille. Il est révolu le temps où les Grands Tours nationaux se contentaient de rester dans le cadre restreint de leur frontière nationale. Oh, il y a déjà bien longtemps qu’ils se permettent une petite incursion dans un pays frontalier. L’Italie accueillait une étape du Tour, le Giro s’enfuyait quelques kilomètres en Suisse, la Vuelta passait un col en France. Puis, on commença a exporter les départs. Je me souviens vers la fin de la guerre froide, le Tour de France prendre ses quartiers à Berlin Ouest et toute la caravane monter sur des estrades pour voir de l’autre côté du Mur. Le Giro en fit autant avec des départs des Pays-Bas ou de Belgique. Le Tour se délocalisa en Grande-Bretagne, où l’on découvrit tout l’amour que portaient les anglais au vélo ; énorme surprise pour les suiveurs qui pendant longtemps comptaient les champions d’Outre Manche sur les doigts d’une main.
Mais cette année, le Giro a franchi une nouvelle marche dans la surenchère vers la mondialisation. Et ce n’est peut-être pas terminé, puisque Mauro Vegni, le directeur de la course ne fermerait pas la porte à un éventuel départ de la course aux...Etats-Unis. Une idée qui a déjà effleuré l’esprit des organisateurs du Tour. La logistique d’un transfert avec décalage horaire étant sans aucun doute la raison pour laquelle cela n’est pas encore arrivé. S’ouvre alors sur les réseaux sociaux le référendum populaire : pour ou contre. Je dois dire qu’en lisant les réactions sur le site de l’Equipe, la Vox Populi semble majoritairement contraire à cette idée. On y dénonce l’appât du gain, le peu d’intérêt d’éventuels circuit, l’atteinte à l’Histoire des Monuments que sont les Grands Tours, la santé des coureurs (tout en maugréant par ailleurs que le Tour ou le Giro, ne sont pas assez durs). Bref, les réactions sont plutôt...réactionnaires. Pas tout à fait étonnant, il faut bien l’admettre.

Aujourd’hui les coureurs sont en en repos, ou plutôt en transfert. Ils débarqueront en Sicile par iun pont aérien. Enfin en Italie diront certains, pour qui le Giro va véritablement débuter. Il est peut-être temps de faire le bilan forcément subjectif de ces trois journées hors Europe. Encore qu’on oublie facilement qu’en terme sportif, Israël, pour des raisons politiques, s’intègrent dans toutes les fédération européennes de sport.

 

Mauro Vegni s’est félicité de sa trouvaille. Comment pouvait-il en être autrement ? Mais il a raison sur un point, peut-être essentiel, le succès populaire. Il y a bien eu nombre de curieux, mais il y a eu aussi des supporters, des spectateurs actifs, des gens venus faire les plaisantins et animer avec beaucoup d’humour et plus ou moins de bon goût les bas côtés de la route. Pêlemêle, je retiendrai le Superman avec un joli embonpoint qui court à côté des coureurs ; l’étonnant engin clownesque, un tandem à deux têtes où chacun semble pédaler dans la direction opposée ; le suiveur déguisé en licorne ; les gars sur leur home-trainer en plein désert ; des bédoins accompagnés de leurs chameaux impassibles ; ce gars avec son écriteau « j’ai travaillé des mois pour vous montrer ce panneau » ; ce groupe de jeunes femmes soulevant leurs tee-shirts au passage du peloton pour leur montrer leurs charmants atouts.

 

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Alors oui, de ce coté-ci, c’était réussi. La crainte d’une caravane passant en plein désert de spectateurs était réelle. Je serai plutôt enclin à penser que ces Grands Départs apportent beaucoup au cyclisme. Si des gamins de ces pays qui n’ont pas encore cette culture du vélo se prend d’amour pour ce sport, ces paris sont gagnés. Même s’il ne faut pas être dupe, ces délocalisations ont surtout un intérêt financier.
Par contre, il est dommage, mais peut-être que le pays ne s’y prêtait pas, d’avoir emprunté des routes trop larges, parfois même des autoroutes, de ne pas avoir déniché un parcours un peu plus sinueux et rugueux. En gros, d’avoir offert au public des étapes de début de Grands Tours, avec des arrivées au sprint déjà certifiées. Ce n’est pas ce bon Elia Viviani qui va s’en plaindre, lui qu’on avait laissé assis et prostré sur la route, en pleurs, lors de sa défaite à Gand-Wevelgem. Il ne faut pas sacrifier la course pour la nouveauté, elle doit rester au cœur de l’événement.  

Comment quitter Israël sans écrire un mot sur Gino Bartali ? Car cette décision de venir jusqu’ici reposait également sur la volonté des organisateurs de rendre un hommage très appuyé au grand cycliste italien. Car peu de personnes savent que « Gino le Pieux » a gagné le surnom de « Gino le Juste ». Et pour cause, le grand rival de Coppi a gardé le silence sur ses activités clandestines durant la guerre. Sous prétexte d’entraînements, Gino passait dans les tubes de son vélo les documents nécessaires au sauvetage des juifs persécutés, au nez et à la moustache des autorités fascistes. Ce n’est qu’à sa mort en 2000 que ce secret a été éventé. On recueillit alors assez de preuves pour que son nom figure désormais sur le monument de Yad Vashem, faisant de Bartali un « juste parmi les nations ». Grace à son action des centaines de juifs ont eu la vie sauve. Le réseau clandestin auquel il appartenait était dirigé par le rabbin de Florence et l’archevêque Elia Angelo Dalla Costa. Elia... tout comme Viviani. La boucle avec le Giro est maintenant bouclée. On peut rentrer au pays.

 

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